Aujourd’hui les centres villes de province sont souvent en perte de vitesse au profit des centres commerciaux de périphérie.
C’est triste car, quand un magasin ferme ce sont des emplois qui disparaissent. Un centre ville déserté par les commerces c’est la vie qui quitte la ville. Malgré son téléphérique flambant presque neuf, ma ville n’échappe pas à ce triste abîme.
J’ai découvert Il y a huit ans le centre de cette ville militaire et portuaire. Parisienne d’origine, j’ai beaucoup apprécié la vie qui s’en dégageait. C’était un joyeux capharnaüm. Sur la rue principale, en dehors de quelques grands magasins qui se faisaient face, il y avait de nombreuses enseignes indépendantes. On pouvait acheter ses vêtements chez Le Gall ou son café au Comptoir de Léon. L’offre était variée, depuis le gadget artisanal chinois jusqu’au jean de grande marque.
En 2011 la ville a rendu sa rue principale piétonne. Elle y a installé le tramway, éliminant toutes les places de parking qui la bordait. L’inauguration était prévue pour l’été 2012… Fin 2012, avec l’augmentation des loyers et la baisse de fréquentation, la majorité des enseignes indépendantes étaient déjà parties. Pour apporter du prestige à cette ville de réputation plouc (plou signifiant ‘bourg’ en breton), la mairie a décider de mener une campagne de montée en gamme sur le bas de centre ville, éloignant ainsi de fait une grande partie de la population. En 2014, au moment de mon mariage, il y avait déjà bon nombre de pas de portes vides.
Aujourd’hui tout le haut de la rue est devenue un ‘no shop land’. La mairie tente de le réhabiliter en achetant les boutiques à l’abandon pour les proposer en location à des tarifs compétitifs. Ils ne trouvent pas preneur.
Actuellement à la recherche d’un local pour notre agence, mes associées et moi avons éliminé cette possibilité sans aucune hésitation : il n’existe pas de solution de stationnement simple et pas cher dans le centre-ville. L’augmentation du prix du stationnement de 25% à la rentrée 2015 est précisément une des raisons qui nous ont fait quitter l’hypercentre il y a un peu plus de deux ans. Encore aujourd’hui, il n’existe pas de stationnement tarif résidentiel pour les professionnels (donc au loyer s’ajouteraient 100€/mois de parking). Plus ennuyeux encore pour une activité professionnelle, aucune solution simple de stationnement n’existe pour nos clients.
« Vous n’avez cas utiliser les transports en commun », pensez-vous certainement.
Certes, mais pour cela il faut prendre la voiture jusqu’à l’arrêt de tram à 500m de la maison, payer le parking du tram et les tickets.
Bon, j’avoue : je suis de mauvaise foi. Un bus passe à 50m de la maison pour rallier le centre-ville en 25 minutes (contre 5 minutes en voiture). Donc oui, en théorie, nous pouvons utiliser les transports en communs.
Sauf que…
Laissez-moi vous rappeler un détail de ma vie de maman qui illustre concrètement pourquoi le centre de ma ville est en perte de vitesse*.
Si vous suivez ce blog avec toute l’attention qu’il mérite, vous savez que le mardi soir est LE moment désagréable de la semaine. En effet, Ririe et Fifi ont trente minutes pour goûter, faire le trajet entre l’école et le centre-ville, prendre leurs précautions avant d’enfiler leurs tenues et monter sur scène pour le cours de danse.
Ces trente minutes, surnommées le sprint du mardi soir, sont une corvée pour tout le monde, totalement inenvisageable en transport en commun. Les enfants fatigués ont envie de souffler et les mamans ont ras le bol de slalomer dans les embouteillages vers le centre-ville qui est en travaux depuis près de deux ans.
Le cours de danse a lieu dans un théâtre de la ville, bâtiment au style coco (communiste, rien à voir avec Mme Chanel), typique de la reconstruction. Mes enfants ont cours sur la scène en parquet vernis. Cette salle est extrêmement ‘bien placée’, derrière l’église principale, non loin de la mairie et de la voie piétonne… en zone payante limitée à deux heures de stationnement : rue ‘orange’. Pas de problème, la rue donne dans une autre en ‘zone verte’, moins chère, où je trouve toujours à me garer. Il nous reste juste 50m à faire à pieds.
Enfin ça c’était avant, parce qu’à l’automne dernier, pendant que les feuilles des arbres rougissaient, la zone verte est devenue elle aussi orange avec une durée maximale augmentée à 3h30.
Pas si grave, avec mon ‘piaf’ (appareil remplaçant les tickets journaliers en centre-ville), je paye ce que je consomme, à la minute près. Donc bon, c’est un peu plus cher, mais finalement comme je mets moins de dix minutes pour décharger les enfants, les changer, les envoyer sur scène et repartir, ce n’est pas bien grave.
Enfin ça c’était avant, parce qu’à l’automne dernier, pour faire roussir les parcmètres, la mairie a changé le dispositif : les ‘piafs’ ne sont pas nominatifs, donc on ne peut plus les utiliser en centre-ville.
Avisée, la professeure de danse nous a indiquée que ce n’est pas bien grave : elle s’est arrangée avec la mairie et les contractuels évitent de passer aux heures de cours. On peut laisser un mot sous le parebrise expliquant qu’on dépose les enfants et roule ma poule.
Enfin ça c’était avant, parce qu’en janvier 2018 l’amende locale pour stationnement est passé de 11€ à 25€. Flairant l’aubaine, peut être par un heureux hasard, un premier contractuel est passé dans la rue, fin janvier. Il a bien sûr fait un carton plein entre les parents qui récupéraient leurs enfants à l’école et, 100m plus loin et quinze minutes plus tard, les parents qui déposaient leurs enfants à la danse. Une véritable aubaine : à peine fini les relevés pour la sortie scolaire, le contractuel peut enchainer sur les activités extra scolaires.
Depuis Janvier également, il n’y a plus d’avis déposé sur les parebrise, donc il s’est passé près d’un mois entre les premiers relevés sur place et la réception à nos domiciles des premiers PV.
Nous nous sommes tous faits alignés. Certains plusieurs fois, dont ma co-mère Swatch !
Alors nous sommes rentrés dans le rang, avons pris le pli d’acheter des tickets de stationnement. 20 centimes pour 15 minutes, sachant qu’il nous en faut seulement cinq pour changer les enfants. Pas le droit de mettre moins de 20 centimes dans l’appareil. La somme parait minime, mais à l’année ce sont 10€ qui s’ajoutent à la facture de l’école de danse (sans compter les 25€ à 75€ d’amende).
Plus enquiquinant encore, faire la démarche d’aller jusqu’à l’appareil, l’allumer (oui, il faut l’allumer), entrer ses données, payer, récupérer le ticket, retourner à la voiture, mettre le ticket en place de façon bien visible, prend cinq minutes (faites-le et vous constaterez)… les mêmes cinq minutes qui nous manquent pour que nos enfants soient prêts sur scène à 17h pour le début de la leçon.
Là, vous pensez : « on peut gagner du temps en envoyant les enfants se changer pendant que l’on paye au parcmètre ».
En théorie vous avez parfaitement raison. En pratique nous parlons d’enfants de 5 à 8 ans… Concernant les quatre convoyés par Swatch et moi-même (en plus des deux figurants de 3 et 8 ans qui ne font pas de danse) : un n’arrive pas à mettre sa tenue seul, deux préfèrent jouer ensemble et faire la ronde et chanter plutôt que se préparer (l n’y a pas que des avantages à faire faire une activité à son enfant avec l’une de ses meilleures amies) et la sage quatrième regarde les trois premiers d’un air surprit, n’osant aller seule jusqu’au vestiaire.
Donc, tous les mardis soirs, une fois que nous sommes parvenu à atteindre l’école de danse, nous perdons quelques minutes pour acheter un ticket à 20 centimes. Cet achat constitue à mon avis une vente forcée, attendu que nous n’avons besoin que de la moitié du temps qu’il nous octroie.
Tous les mardis soirs, nous croisons les contractuels qui regardent nos voitures en soupirant : l’aubaine a disparu.
Tous les mardis soirs, Swatch et moi nous soutenons mutuellement pour tenter d’envoyer les quatre enfants sur scène à temps.
Tous les mardis soirs, Swatch et/ou moi échouons lamentablement à tenir le timing qui nous est imparti.
Tous les mardis soirs, la professeure de danse a la gentillesse de nous laisser les cinq minutes de grâce qui nous manquent pour respecter le délai contractuel, décalant ainsi ses leçons pour toute la fin de journée.
Tous les mardis soirs…
L’an prochain il n’y aura plus de sprint du mardi soir.
* Je pense malheureusement cet exemple applicable à bien d’autres villes de province et tiens à saluer l’initiative de La Rochelle qui a rendu les transports en commun gratuits.
Nota1 : pour tenter d’aider les commerces, la mairie de Brest a rendu le stationnement gratuit le samedi matin. Pour ma part, je pense qu’offrir une demi-heure (au minimum) de stationnement aux personnes venant faire une course en centre ville serait un geste nettement plus commercial et efficace.
Nota2 : en préparant cet article j’ai découvert que 30 minutes de stationnement en zone orange coutent 50 centimes d’euros et que le tarif à la minute augmente de façon exponentielle jusqu’à la durée maximale : 3h30 facturée 25€ (autant prendre l’amende pour un tarif égal). Quelqu’un peut m’expliquer la logique ?
Une des raisons pour lesquels je ne me rend plus en ville, parce que je n’ai plus de plaisir à y aller flaner. Quand j’y vais c’est que j’ai un objectif précis. Si c’est pour penser au parcmètre merci bien. j’ai tout ce qu’il me faut dans ma petite ville environante.
C’est vrai que c’est abusé de sentir les contractuels rodés au moment des cours, c’est presque que du harcèlement !
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Je suis pour être dans la légalité et suis plutôt une personne correcte… mais là, je trouve que c’est vraiment pas terrible en effet !
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Sur Auxerre, tout le centre ville est payant comme partout mais la municipalité offre 30 minutes par jour (avec la plaque d’immatriculation) et je trouve ça vraiment bien. Même les parkings privés ont suivi le mouvement.
Les municipalités sont tiraillées dans tous les sens et ça doit être bien compliqué de faire les bons choix… mais aligner les seuls pouvant réanimer le centre ville n’est certainement pas le meilleur moyen.
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C’est pas mal ce système de 30 minutes offertes quotidiennement. Si on a une course rapide à faire, pas la peine d’hésiter. Si je bénéficiais de cela chez moi, il est possible que je pousserai régulièrement vers la super librairie qui est à moins de 100m de l’école de danse. Mais au vu des circonstances, je n’y ait pas mis les pieds depuis la rentrée… je n’ai même pas été cherché les cadeaux fidélité offerts pour mes enfants tellement cela me saoule cette histoire de stationnement
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Ici avec mon ancien boulot je devais prendre ma voiture pour aller sur Paris. J’ai découvert le stationnement à 8 euros pour 2 h mais ce m’a pas empêché d’être aligné pour un dépassement de quelques minutes ou un stationnement à contre sens de circulation. Bref maintenant je réfléchis à deux fois avant de payer …et pourtant je prone plutôt l’honnêteté et le respect des règles.
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Ce que tu veux dire, c’est que quelque part c’est parfois moins cher de se faire aligner que de payer ?
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Ben oui…mon sens de la justice en prend un coup mais oui…
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Pffff que de petits grains de sables, complètements aberrant et qui compliquent la vie…
Et après ils ne font pas le lien avec la désertification du centre ville ? 😦
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Il ne le font tellement pas qu’ils sont entrain de mettre en place le même système au port de commerce qui est un des lieux de sortie (bars, restaus & co) des touristes et des locaux. J’ai un copain restaurateur dans cette zône, il est catastrophé
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il faut écrire à la mairie !!!
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On voit que chez toi ce n’est pas l’oligarchie 😉
Ici la consultation pour le téléphérique a eu lieu après le début des travaux…
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